Le 11 juillet, le Conseil d’État n’a pas jugé recevables les arguments des hauts fonctionnaires qui l’avaient saisi afin de remettre en cause, dans les plus brefs délais, la nouvelle Agence nationale du Sport dans ses modalités actuelles.

Deux mois après le premier Conseil d’administration de l’Agence nationale du Sport (ANS), son existence légale était contestée en référé devant la plus haute juridiction administrative. La fronde émane de l’intérieur même du ministère puisqu’elle est le fait de deux organisations syndicales représentant ses inspecteurs généraux de la Jeunesse et des Sports. Ils réclamaient la suspension de l’arrêté et des deux décrets qui ont permis de mettre sur pied l’Agence. En cause, un changement de paradigme jugé inacceptable à leurs yeux. En l’occurrence, « le transfert, sans passer par le Parlement, de soixante-dix ans de lois sur le sport français à un Groupement d’Intérêt Public (GIP) » lequel voit l’État mettre la main à la poche sans ne plus pouvoir tout régenter ni donc avoir les coudées franches.

Les plaignants contestaient le désengagement de l’État du domaine du sport

Et ce, dans la mesure où la direction de la nouvelle instance est quadripartite puisqu’elle associe l’État, quand bien même celui-ci demeure-t-il majoritaire, mais également les collectivités territoriales, le mouvement sportif (CNOSF et CPSF) et les entreprises. Avec, à la clef, un double champ de compétence, le haut niveau et le développement des pratiques sportives. Plus précisément, ce sera l’ANS qui versera, à la place du ministère, les subventions aux fédérations sportives pour ce qui est du haut niveau (environ 90 millions d’euros, en 2019) et qui approuvera les projets desdites fédérations pour octroyer des fonds aux clubs amateurs dans les territoires. Et ce, en lieu et place du Centre National pour le Développement du Sport (CNDS), lequel a été rayé de la carte.

Les plaignants contestaient principalement trois choses devant le Conseil d’État : d’une part, le désengagement de l’État du domaine du sport ; d’autre part, le fait que jusqu’à présent, seul ce dernier l’État ait abondé le budget 2019 de l’Agence, à hauteur de 350 millions d’euros. Or, dans un GIP, car tel est le statut de l’ANS, l’ensemble des parties sont censées mettre la main à la poche. Enfin, le fait que le Gouvernement devait, pour agir, passer par les fourches caudines de la loi et non pas par l’unilatéralisme des décrets et des arrêtés.

Autant dire que si le Conseil d’État avait suivi les requérants, l’Agence nationale du Sport eut été mort-née et tout eut été à refaire alors même qu’elle a déjà tenu deux Conseils d’Administration et commencé à prendre certaines mesures, en particulier la délivrance de bourses à 500 athlètes médaillables aux Jeux Olympiques et Paralympiques. On imagine le temps perdu et la paralysie du système à un an des JOP de Tokyo et cinq des Jeux de Paris.

Poursuivre, aux côtés des parlementaires, l’enrichissement du modèle sportif français

Finalement, le verdict est tombé jeudi 11 juillet. Le Conseil d’État n’a pas donné suite aux demandes de l’Association professionnelle de l’Inspection générale de la Jeunesse et des Sports (Apigjs) et du Syndicat national des inspecteurs généraux de la Jeunesse et des Sports. Et de justifier que « les effets des décisions litigieuses n’apparaissent pas, à la date de la présente ordonnance, de nature à caractériser une urgence justifiant que leur exécution soit suspendue ». Mais, pour l’Apigjs, la bataille continue : « Nous prenons acte de cette décision qui ne se prononce pas, à ce stade, sur les multiples motifs d’illégalité des textes attaqués que nous avons invoqués. La décision de ce jour n’a pas d’incidence directe sur l’instruction de nos recours au fond, qui se poursuit devant le Conseil d’État. »

Reste que ces attendus vont permettre au ministère d’aller plus avant. « L’action engagée en faveur des associations sportives, des fédérations, des collectivités territoriales et de tous les acteurs impliqués dans l’Agence nationale du sport peut ainsi continuer à se déployer », s’est-il félicité. Toutefois, les services de Roxana Maracineanu ont pris le soin de préciser que « la Ministre est déterminée à poursuivre, aux côtés des parlementaires, l’enrichissement du modèle sportif français dans le cadre notamment de l’examen en cours du projet de loi sur les Voies olympiques et l’Agence nationale du Sport ».

Alexandre Terrini