Las de voir de voir les subventions octroyées par l’État se réduire au mépris des ambitions affichées dans la perspective des JO de Paris en 2024, le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) demande que le sport soit traité comme il le mérite par le Gouvernement.

Selon une étude du Centre de droit et d’économie du sport (Cdes), le poids économique du mouvement sportif s’élèverait, en France, à 11,69 milliards d’euros dont 3,03 milliards pour ce qui est du sport professionnel et 2,41 milliards d’euros pour ce qui relève des dépenses personnelles des pratiquants. Quant au bénévolat sportif, il peut être valorisé entre 5,22 milliards (valorisation au Smic) et 10,10 milliards d’euros (valorisation au salaire moyen de la branche). Ces chiffres, qui sont des estimations minimales, attestent du poids économique et de l’impact sociétal du sport, en somme, de tout ce qu’il apporte à la Nation.

Une contribution dont ne pourra faire fi la future gouvernance partagée du sport français, en l’occurrence, une structure de type Groupement d’intérêt public (GIP) entre les quatre principaux acteurs que sont l’État, les collectivités locales, le mouvement sportif et le monde économique. Or, « le fonctionnement du GIP sera forcément conditionné par les moyens dont il disposera », prévient Denis Masseglia, Président du CNOSF. Lequel a évalué à 400 millions d’euros le budget qui doit être dévolu à la future agence pour qu’elle ait les moyens de ses ambitions. Un montant à ses yeux pleinement justifié pour la simple et bonne raison que le sport fait gagner de l’argent au pays et à l’État.

« Faire la démonstration que l’économie du sport a changé »

« Il est important pour nous de faire la démonstration que l’économie du sport a changé et que demain, il y aura encore plus de produits financiers qui proviendront du sport », justifie Denis Masseglia. Des droits télévisés du football qui vont prochainement dépasser le milliard d’euros, l’organisation d’événements sportifs (Ryder Cup, Euro féminin de hand, Coupe du monde de football féminin, Coupe du monde de rugby, JO de Paris…) qui sont forcément source d’activité et de bénéfices sonnants et trébuchants tout comme, au plan fiscal pour l’État, les charges acquittées par les clubs professionnels (leur contribution sociale et fiscale directe dépassant le milliard d’euros, N.D.L.R.) ainsi que les impôts auxquels sont soumis les sportifs professionnels, sans compter la croissance régulière des sommes affectées aux paris sportifs (plus de 6 milliards d’euros en 2018, N.D.L.R.) : le sport est une précieuse manne de revenus pour les pouvoirs publics mais pas que pour eux.

Comme le rappelle le Cdes, « les bénéfices tangibles du sport sont de deux ordres :

  • infrastructurels : l’organisation de l’activité ou de la pratique sportive peut contribuer au développement d’infrastructures sportives, non sportives (logements, dessertes etc.), voire multifonctionnelles dès lors qu’elle implique la création d’infrastructures ou la rénovation/modernisation d’infrastructures existantes.
  • économiques : l’organisation de l’activité ou de la pratique sportive peut participer à accroître le dynamisme économique dès lors que les injections monétaires qu’elle suscite sont génératrices de nouveaux revenus qui seront en tout ou partie destinés à la consommation ou à l’investissement productif dans le pays. »

« L’explosion de la pratique sportive crée beaucoup de richesses économiques », insiste, de son côté, Denis Masseglia, sachant que « la pratique sportive du plus grand nombre pèse beaucoup plus économiquement que la pratique professionnelle. Mais ce serait un risque de penser que cette source pourrait ne jamais se tarir. En effet, si l’on ne fait pas attention aux difficultés que les clubs rencontrent et que la base ressent, on risque fort de ne pas avoir la croissance économique que le sport est susceptible de générer, laquelle pourrait ne pas être au rendez-vous. Il faut songer à la pérennisation de l’économie du sport. Pour cela, il y a une condition incontournable : permettre au mouvement sportif et à ses clubs de continuer la mission qui est la leur. »

A cet égard, le Cdes identifie « six grandes catégories de bénéfices sociaux » :

  • l’amélioration de la santé publique par l’activité physique ;
  • la contribution du sport aux missions d’éducation et de formation ;
  • la contribution du sport au bénévolat et à la citoyenneté active ;
  • le renforcement de la prévention et de la répression du racisme et de la violence par le sport ;
  • le soutien du sport au développement durable ;
  • la création et le développement des liens sociaux grâce au sport.

Ce qui fait dire au Cdes que « le sport est plus particulièrement facteur d’inclusion sociale, d’intégration et d’égalité des chances et contribue ainsi à une amélioration globale du bien-être social ». Il est générateur d’emplois et source d’amélioration de la qualité de vie.

« Une question de logique et de justice »

Au regard du panel de ses bienfaits, « faut-il rester indifférent au manque de retour sur investissement alors que le sport enrichit la Nation ? La base sportive, composée des clubs et des bénévoles, doit-elle être l’oubliée de cette croissance ?, fait mine de s’interroger le Président du CNOSF. C’est juste une question de logique et de justice sachant que ce qui n’était pas possible il y a quelques années, le devient aujourd’hui. » En effet, le sport s’est développé à un point tel qu’il engendre suffisamment de recettes pour prétendre en percevoir autant que de besoin. Car c’est bel et bien l’ensemble de l’édifice qui est en jeu : «  Sans les clubs, il n’y a pas de champions, ni d’équipes de France ni de lien social ni d’éducation ni de santé, martèle Denis Masseglia. Cette base sportive a besoin de reconnaissance et de considération à un moment où elle est en plein désarroi alors que le sport ne s’est jamais aussi bien porté. Elle a besoin de moyens pour continuer sa mission, en l’occurrence, celle de former des hommes, des femmes et des citoyens et permettre à chacun de s’épanouir. »

En clair, « Le sport peut et doit financer le sport ! » et « #le sport compte ». Ces deux slogans, le dernier sous forme de hashtag, résument à eux seuls le discours du CNOSF. Quant à la pétition, intitulée « Sport pour tous et tous pour le sport », qu’il devait lancer pour inciter le Gouvernement à débloquer les fonds attendus, le Comité a décidé d’attendre la fin des arbitrages budgétaires en cours avant de passer à l’acte.

Or, le récent imbroglio sur la suppression programmée, d’ici 2022, de 1 600 postes de Conseiller technique sportif (CTS) ne fait que raviver l’inquiétude du sport français. « Aucun des 1 600 CTS évoqués dans le document (une lettre de cadrage, N.D.L.R.) (…) ne perdra son emploi », a assuré la nouvelle ministre des Sports, Roxana Maracineanu. Les services du Premier ministre parlent, eux, d’un « objectif d’évolution dans le cadre de gestion ». « Leur mode de gestion doit être modernisé, leur rôle au sein des fédérations (…) retravaillé avec le mouvement sportif (et) leur statut réinterrogé », affirme Matignon. En clair, les CTS seraient, à l’avenir, rémunérés par les Fédérations et non plus par l’État en tant que fonctionnaires. Ce à quoi, à l’image de l’Association des directeurs techniques nationaux (AsDTN), les instances sportives se refusent, conscientes qu’elles ne disposent pas du budget pour ce faire.

Alexandre Terrini