Dans un référé, publié le mois dernier, les Sages de la rue Cambon formulent des recommandations sur la gouvernance financière des Jeux Olympiques et Paralympiques Paris 2024. Même si, par nature, l’exercice commande de se montrer pointilleux, le ton autant que le contenu sonnent comme des avertissements.

COJOP – SOLIDEO : qui fait quoi précisément ?

On le sait, le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) est une association relevant de la loi de 1901 chargée de planifier, d’organiser, de promouvoir et de financer les Jeux de Paris 2024 ainsi que les événements qui y sont associés. De son côté, la Société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) est Établissement public industriel et commercial (Epic) de l’État responsable de la livraison des sites et des infrastructures Olympiques.

Or, si l’un et l’autre « sont aujourd’hui pleinement opérationnels », note la Cour, elle déplore que « la convention globale, qui doit encadrer les responsabilités opérationnelles et financières du COJOP et de la SOLIDEO, ne soit toujours pas signée ». Les Sages de la rue Cambon voient là « un facteur d’insécurité pour la tenue des délais et des coûts, la SOLIDEO ayant notamment besoin que le périmètre des sites Olympiques, placés sous sa responsabilité, soit stabilisé ».

Plus largement, ils redoutent que chacun joue sa partition de son côté. C’est pourquoi « il convient de resserrer la coordination opérationnelle sous l’autorité du Délégué interministériel aux Jeux Olympiques et Paralympiques », d’une part, entre les services de l’État et, d’autre part, entre l’État, la Ville de Paris, le Département de Seine-Saint-Denis et, enfin entre le COJOP et la SOLIDEO.

Budget : rester dans les clous

On le rappelle, le budget total des Jeux Olympiques et Paralympiques Paris 2024 s’élève à 7,3 milliards d’euros, 3,9 étant sous l’égide du COJOP et 3,4 sous celle de la SOLIDEO. Une enveloppe qu’il s’agit évidemment de respecter, ce qui sera, au demeurant, « l’un des critères de réussite » des JOP de 2024. Ce qui n’est pas acquis, suggère la Cour des Comptes. « Il subsiste des incertitudes significatives sur le niveau des recettes en dépit de la notification de concours supplémentaires du Comité international olympique (CIO) que ce dernier doit encore officialiser », pointe-t-elle. En cause, l’objectif de 1,1 milliard d’euros de partenariats domestiques qui n’est atteint, en ce début d’année, qu’à hauteur de 46 %. Par ailleurs, les hypothèses de recettes de billetterie, estimées à 1,5 milliard d’euros « pourraient être affectées par les effets de long terme de la crise sanitaire ».

Des paramètres qui conduisent la Cour à préconiser une réduction de voilure : « Il serait opportun que le COJOP teste, par précaution, des scénarios de redimensionnement de son budget, placé sous de plus fortes contraintes de ressources. » Sachant qu’aucune disposition législative ne précise, à ce jour, les modalités de couverture d’un éventuel déficit de l’organisation des JOP même si l’État s’est engagé, sur le principe, à l’assumer.

La Cour des Comptes met en garde contre les écueils d’une navigation à vue. Ainsi, le coût des infrastructures Olympiques portées par la SOLIDEO qui, dans la maquette financière initiale, s’établissait à 1,63 milliard d’euros, s’élève désormais à 1,83 milliard d’euros. Un prévisionnel qui ne comprend « ni le coût prévisionnel de la crise Covid sur les travaux (environ 40 millions d’euros) ni le coût final du phasage de l’opération du village des media au-delà de 2024 » ni l’intégration, « en dépenses comme en recettes, de l’indexation des coûts de la construction », laquelle est évaluée à 190 millions d’euros.

Conclusion de la Cour : il est urgent de procéder à l’actualisation de la maquette avant la fin du premier semestre 2021 et d’ajuster en conséquence les conventions de financement passées avec les collectivités territoriales concernées. Par ailleurs, « la maquette financière de la SOLIDEO n’englobant pas la totalité des investissements réalisés à l’occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques par l’État et par les collectivités, une présentation consolidée et transparente de l’ensemble des opérations et financements publics s’avère en outre indispensable ». Pour éviter d’aller dans le mur et que le volet comptable des Jeux ne vampirise leur attrait sportif et sociétal.

Alexandre Terrini