La publication, le 1er mars, du Baromètre national des pratiques sportives 2020, fruit des travaux de l’Institut National de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire (INJEP), donne à voir la manière dont le pays fait du sport. Bien sûr, l’épidémie de Covid-19 et ses effets délétères sont passés par là. Cependant, une chose est sûre : le sport encadré et fédéré, pour lequel se bat le CROS Île-de-France, est sérieusement mis à mal.

Un niveau de pratique stable

Premier constat aux allures de demi-satisfaction, le taux de pratique n’a guère évolué par rapport à 2018, en dépit du contexte particulier du confinement. En effet, la première édition du Baromètre, en 2018, recensait 66 % de Français de 15 ans et plus qui avaient pratiqué au moins une activité physique et sportive au cours des douze derniers mois. En 2020, ils sont 65 %. Il n’en reste pas moins que 24 % des Français sont des sédentaires purs et durs qui ont renoncé au sport et se déplacent, dans le cadre de leurs trajets du quotidien, en voiture ou avec les transports en commun. De surcroît, les Français sont moins éclectiques : ils sont moins nombreux à s’être essayés à plusieurs disciplines ou à des disciplines issues d’univers différents. Ainsi, en 2018, 22 % d’entre eux avaient testé des activités appartenant à au moins trois univers. Ils n’étaient plus que 19 % à l’avoir fait en 2020.

Des disciplines plus en vogue que d’autres

Entre 2018 et 2020, la plupart des univers sportifs ont enregistré une baisse du nombre de leurs pratiquants. Seuls trois d’entre eux ont échappé à la règle et présenté une tendance à la croissance de leurs adeptes. Il s’agit respectivement de la course et de la marche (pour lesquelles 42 % des Français ont opté en 2020 contre 38 % en 2018), des activités de la forme et de la gymnastique (28 % en 2020 contre 22 % en 2018) et enfin, des sports urbains (6 % en 2020 contre 4  % en 2018). Outre un penchant spontané qui s’est confirmé, le confinement et les contraintes sanitaires imposés par le Gouvernement en raison de l’épidémie de Covid-19 n’ont pas été sans conséquences dans la mesure où ces disciplines (en majorité d’extérieur) ont été autorisées contrairement à d’autres. Par ailleurs, la gymnastique et les autres activités de « forme » (vélo et rameur d’intérieur, fitness, cardio-training etc.) offrent l’avantage de pouvoir être déclinées chez soi.

Le confinement a changé les mœurs

« Indubitablement, le constat qui prévaut est celui d’un impact négatif du confinement sur l’ensemble des pratiques sportives, résume l’INJEP. La pratique sportive a diminué d’une dizaine de points pendant le premier confinement, passant de 64 % de pratiquants à 53 % (….) Même les domaines en plein essor comme la marche et la course ont été freinés par le confinement. Quasiment aucun non-pratiquant ne s’est mis à la pratique sportive pendant le confinement et 82 % des pratiquants hors confinement ont continué à pratiquer pendant le premier confinement. Il n’y a pas eu d’engouement pour le sport ni d’augmentation de la pratique chez les pratiquants qui ont persévéré pendant le confinement. »

En revanche, la façon de suer a changé avec, au menu, « pendant le premier confinement, des séances plus courtes mais pas plus intenses que hors confinement ». Pour le reste, les disciplines qui ont le mieux résisté à la pandémie sont celles de la gymnastique et de la forme.

En outre, « l’impact le plus fort du confinement concerne le lieu de la pratique : pendant le premier confinement, quasiment deux fois plus de séances se passent majoritairement à domicile », affirme l’INJEP.

Une assertion qui, à y regarder de plus près, n’a rien de conjoncturel dans la mesure où elle a perduré et même progressé hors période de confinement. Une mode qui s’explique par différentes motivations : un souci d’autonomie, la volonté de pouvoir faire du sport quand on veut, des considérations financières car « cela revient moins cher », le souhait de gagner du temps et enfin, le désir d’éviter le regard des autres.

La portion congrue pour la pratique en club

Deuxième constat fait par l’Injep, « le confinement a consacré une pratique sportive autonome, sans partenaire et sans encadrement ». En effet, en 2020, 51 % des sportifs se sont livrés principalement seuls à leur activité physique et sportive hors confinement, un taux qui a atteint 66 % durant le confinement. La tendance est la même s’agissant du cadre de la pratique sportive puisque la pratique autonome, déjà majoritaire en 2018, l’était davantage encore en 2020 : elle concernait 61 % des sondés hors confinement et 73 % durant le confinement. Conséquence, hélas logique, de cette évolution des mœurs, « c’est la pratique en club, en association qui est réduite à portion congrue (passant de 20 % à 6 %) ». Les statistiques sont loin d’être rassurantes : en 2020, 55 % (contre 53 % en 2018) des sondés ne bénéficiaient d’aucun encadrement (ni entraîneur ni éducateur sportif) pour leur sport principal. Le phénomène s’est évidemment accentué au cours du confinement avec une pratique sportive deux fois sur trois sans encadrement.

Ce qui a incité la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, à pointer la nécessité cruciale, pour les associations sportives, d’étoffer leurs offres de pratiques et de repenser les modalités selon lesquelles elles sont dispensées.

Moins d’appétence pour les nouvelles activités

Autre ombre au tableau, le fait que « d’une façon générale, en 2020, les Français ont moins envie qu’en 2018 de découvrir de nouvelles activités ». En 2020, une personne sur cinq (21% contre 24 % en 2018) aspirait à s’initier à un sport dont elle n’était, jusque-là, pas coutumière. Une appétence toutefois plus marquée chez les plus jeunes (34 % des 15-24 ans), les étudiants (40 %), les plus diplômés (26 % des bac+3 ou 4), ceux qui se jugent en bonne santé et enfin, chez ceux qui sont déjà rompus à l’effort physique. En clair, on notait, en 2020, une baisse de l’envie de se mettre au sport de la part des non-pratiquants. Et c’est sans doute cela le plus inquiétant.

Les variants… sociologiques

Alexandre Terrini